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MINISAUTS présente Séverine, créatrice de Saly Savons, une femme aux milles envies et (si la réincarnation existe) aux milles vies

Fascinée par ses femmes authentiques, passionnées et engagées, héroïnes dans leur art et à travers leur métier, j’ai évidemment savouré cet échange avec Séverine Thomassin ! Un parcours riche en expériences, en observations et en réflexions qui l’a mené vers l’entrepreneuriat. Elle le dit parfaitement bien, ce cheminement a été nécessaire pour en arrive là, d’ailleurs tout est une question de temps, de petits pas, c’est quelque chose d’inévitable et de tout à fait logique quand on y réfléchit. L’humain est beau et le monde peut l’être encore plus grâce à nous. Nous avons tous quelque chose à apporter si nous décidons de bien faire les choses dans notre domaine et d’agir avec une conscience responsable envers soi-même et la nature qui nous entoure. Fille d’agriculteur et d’infirmière, elle connaît la valeur du travail, ses valeurs et ses convictions. Elle se nourrit de la nature et des rencontres humaines pour trouver la meilleure façon d’agir à son échelle. Au fur et à mesure qu’elle a avancé dans sa vie, elle n’a jamais perdu de vue cette chance de vivre sa vie librement et cette liberté elle s’en est emparée il y a quatre années…
Place à l’interview ! Très belle lecture.

Bonjour Séverine, peux-tu te présenter et nous raconter ton histoire ?

Je m’appelle Séverine Thomassin mais cela fait une dizaine d’années que l’on me surnomme Saly. J’aime apprendre, découvrir et partager. J’aime une multitude de choses dans la vie et d’ailleurs mon désir le plus grand serait de pouvoir mettre mille vies dans une vie !

Saly Savons est né d’une réflexion personnelle intense et d’un besoin immense d’apporter le meilleur à la peau, de proposer quelque chose de différent et du « clean » avant tout. Pour tout vous dire, ma deuxième fille est née avec des problèmes d’eczéma et je n’étais pas satisfaite des produits proposés sur le marché donc j’ai fini par ne plus avoir confiance en la dermatologie. De par mon métier d’infirmière, j’avais déjà des connaissances et des prérequis. Je suis une autodidacte. J’ai commencé en fabriquant des savons à la maison pour ma famille et pour cela je me suis beaucoup documentée sur les matières premières et les formulations. C’est comme ça que, petit à petit, je me suis lancée. Le savon douceur d’avocat a été le tout premier, il marque le début de cette belle aventure.

Quelle est la raison d’être de ton aventure entrepreneuriale et de sa mise en place à aujourd’hui ?

Je n’étais pas satisfaite des produits que j’achetais dans le commerce ni des missions que l’on m’attribuait côté professionnel, je ne me sentais plus en phase avec mes actions au quotidien. En parallèle, j’adorais réfléchir à des recettes de savons et fabriquer des produits pour ma famille et mes proches. J’avais des bons retours donc j’ai décidé d’en faire mon activité à part entière. Mon leitmotiv a vraiment été celui-ci : on a qu’une vie alors autant qu’elle soit la plus belle possible !

Il a fallu convaincre mon entourage et les autorités car à ce moment-là j’avais un poste de responsable. J’étais déterminée mais avec rigueur et détermination on y arrive, le rythme est intense mais l’aventure en vaut la chandelle !

Cette nouvelle activité nourrit mes besoins d’apprendre, de découvrir toujours plus, de créer bien sûr et de partager avec les autres. Je conserve ma mission de prendre soin des gens. En tant que femme, le défi est double car on doit être une bonne mère et une bonne cheffe d’entreprise. C’est un équilibre fragile pour une femme entrepreneure. Il y a une mise au point à faire dans le couple car il y a des évidences par rapport aux enfants ou à certaines tâches domestiques. C’est important de soutenir les femmes dans leur parcours entrepreneurial pour réussir à avoir un bel équilibre de vie pro/perso.

Peux-tu nous parler de la construction de ton entreprise ?

Fin 2016, l’idée à germé dans ma tête, puis début 2017, j’ai vécu un accident de la vie dans ma famille proche, cela a été suffisamment bouleversant pour faire naître une grosse réflexion en moi. J’ai structuré mes idées et entrepris les démarches administratives pour préparer mon tournant professionnel. Au départ, je me suis formée à l’ université des senteurs à Forcalquier où j’ai obtenu une certification de savonnier professionnel et un peu plus tard j’ai poursuivi une formation en chimie verte et formulation. J’ai créé l’entreprise en mai 2018 et j’ai conçu un laboratoire aux normes au sein de ma maison. L’identité de la marque a pris forme. J’ai poursuivi avec le dépôt des formules qui est une étape obligatoire et relativement longue.

La commercialisation a démarré début décembre 2018. Pendant deux années j’ai travaillé seule, la marque a rapidement été appréciée, j’ai commencé à avoir de jolis clients et de belles propositions et j’ai compris qu’il fallait que l’équipe s’agrandisse pour les honorer. La période n’était pas des meilleures car nous étions en pleine crise Covid et il m’arrivait d’aller aider à l’hôpital. Pour agrandir ma structure, j’ai effectué un prêt, cela m’a aidé à investir davantage. En étant chez moi, je ne pouvais pas employer quelqu’un. J’ai trouvé des financements, je me suis projetée dans un local plus grand et petit à petit j’ai formé une puis deux personnes. Je me suis également entourée de prestataires de confiance. A ce jour, j’ai trois employés et trois alternants.

L’idée est vraiment d’impliquer les gens à faire grandir l’entreprise avec une vision commune, avoir un management horizontal et penser à l’épanouissement de chacun et chacune pour aimer le travail que l’on fait et les valeurs que l’on porte. Sans tout cela, l’aventure n’aurait pas de sens.

Mon recrutement se fait surtout en fonction de l’humain au-delà de ses compétences.

Peux-tu nous parler de la gestion de production des produits ?

Pour les savons, étant donné que j’ai choisi de travailler la saponification à froid, il y a un délai de 6 à 8 semaines de process de fabrication. Au fil des ans, je constitue un stock considérable et cela me permet de répondre à des commandes plus ou moins importantes tout en assurant la qualité des produits à mes clients. Concernant les cosmétiques, on est sur de la petite série car on peut avoir une semaine d’intervalle entre la fabrication et la commercialisation. La gestion des matières premières a nécessité une grande rigueur dans mon organisation, il a fallu anticiper et prévoir en ayant du stock d’avance pour passer outre les fluctuations de prix et les pénuries. Je suis pour une consommation au plus juste, sans perte, avec une gymnastique de ré-emploi, le respect des matières premières et l’acceptation de produits non identiques (variation de forme, décalage du marquage, etc). Chaque année, nous essayons de nous améliorer sur la globalité de notre travail.

Comment est venue cette envie de diversifier la marque et d’aller explorer d’autres catégories de produits ?

J’ai imaginé ces différentes catégories en fonction des besoins observés et des différents profils de consommateurs. Quand on y réfléchit, l’achat d’un savon solide va forcément impliquer une routine propre à ce type de produit pour bien savoir l’utiliser et le conserver. Ma première employée m’a notamment aidé à proposer les premiers accessoires cousus, cela nous a permis ensemble d’avoir une grande souplesse dans le choix des tissus et dans la créa. Cette diversité et ce travail sur-mesure permet de convaincre des hôtels et des maternités par exemple. Nous sommes fiers de tout faire nous-même.

Qu’est-ce qui te stimule le plus dans ce métier ?

J’aime être sur tous les fronts et porter une attention particulière à toutes les idées qui fusent dans ma tête pour leur permettre un jour d’exister.Si je dois me mettre à un seul poste je dirais sans hésiter la recherche et la création. Aujourd’hui, je crée aussi pour d’autres marques et j’en suis très heureuse car cela me permet de ne jamais stopper ma créativité, cela m’invite dans d’autres univers et j’en suis ravie, je me sens presque chanceuse. L’essence de ma reconversion est la création axée plaisir et qualité, c’est réellement ce qui m’anime depuis ces quatre années.

Peux-tu nous parler de Valambrun ?

Il s’agit d’une marque à part entière qui se compose de nos cosmétiques. Pour tout vous dire, le nom de l’entreprise est en cours de changement, Saly Savons va devenir Saly Cosmétiques, et nous y retrouverons Saly Savons et Valambrun. Cette construction pas à pas est importante, c’est un cheminement tout au long de la vie de l’entreprise. Je le dis souvent à mon équipe, cela prend du temps de structurer, de construire et déconstruire. A l’échelle de Saly Savons, c’est un cheminement de chaque instant, il y a toujours une nouvelle réflexion et une nouvelle problématique qui arrive, il faut être patient, accepter de revenir en arrière parfois et de ne pas avoir conscience de tout tout de suite. C’est une bataille de chaque jour d’être une entreprise créative, éco-responsable et compétitive dans notre monde.

Quelle est ta routine de travail et sous quelle forme se présente-t-elle ?

Le process de fabrication des savons s’étale sur deux journées de travail, précisément les lundis et mardis. On commence par préparer le matériel, les formules puis on coule en fin de journée. Le lendemain, on démoule et on coupe. En fin de semaine, on va plutôt se consacrer aux autres cosmétiques de type huiles, crèmes et déodorants qui nécessitent un process plus court. Concernant la recherche et le développement, j’aime m’y plonger lorsqu’il n’y a plus personne, pour être libre de rêver mes odeurs et mes textures. Cela était possible uniquement les soirs et les week-ends mais depuis peu et, j’en suis plus que ravie, nous avons ajusté les plannings pour que je puisse avoir une journée tous les quinze jours où je suis totalement seule dans le labo.

Il est important de penser à son équilibre familial et à essayer au mieux de ne pas travailler en dehors de la semaine ni trop tard le soir. Même chose pour l’administratif et la partie RH, depuis cette année j’ai décidé d’instaurer une matinée chez moi au calme, je reste tout de même joignable mais je ne suis pas là physiquement. C’est important de ritualiser et d’adapter l’organisation du temps de travail pour être au plus efficace dans tous les aspects de l’entreprise.

Selon toi, que signifie être chef.f.e d’entreprise et quelle cheffe d’entreprise es-tu ?

Il faut avoir une certaine plasticité cérébrale et il faut pouvoir passer du « coq à l’âne ». Il faut aimer apprendre, être polyvalent et se confronter au challenge. J’adore être entourée d’alternants et de stagiaires car ils et elles bousculent mes idées, cela nourrit ma soif d’apprendre et de découvrir toujours des nouvelles façons de faire, de nouvelles méthodes pour plus d’efficacité. Tout m’intéresse ! Je vais commencer une formation en commerce international car j’ai des propositions ailleurs. J’ai besoin de maîtriser et de suffisamment me documenter avant de me lancer dans quelques chose de nouveau.

J’ai besoin que ma vie soit remplie et ait du sens. Si l’aventure Saly Savons devait s’arrêter j’aimerais continuer à apprendre et je recommencerais dans un nouveau métier. Je me verrais bien faire mille choses ! La vie peut être vécue de tellement de belles façons, l’humain est beau par son intelligence et ses capacités.

Penses-tu avoir trouvé un équilibre de vie pro/perso ?

Il est en construction. Chaque année je me dis ce que sera la bonne mais il se crée petit à petit. Il y a des périodes où l’équilibre est un peu plus présent car il y a une saisonnalité dans mon secteur d’activité et cela a forcément un impact. Il y a des moments qui sont plus compliqués que d’autres et encore que je trouve toujours des solutions, par exemple ça m’arrive d’emmener mes enfants au labo et ensemble on parle de ce que je fais. Il y a d’autres moments plus libres où on part se balader en montagne ou au lac car nous habitons en Haute-Savoie. Il y a aussi des moments où je prends le temps de fabriquer des produits avec eux car à force de me voir créer ils ont eux aussi des envies. Je crois profondément qu’il vaut mieux vivre un instant plein de courte durée plutôt que de se voir chaque jour mais de ne pas savourer.

Quelle est ta découverte du moment (ou de la vie), celle que tu as envie de partager avec les lectrices et les lecteurs de Minisauts ?

Tout d’abord, je répondrais à cette belle question en parlant de quelque chose d’essentiel pour moi, l’être humain. C’est mon leitmotiv, le fil rouge de ma vie, je l’aime dans tous ses états.

Si je réfléchis à ce qui m’a touché dernièrement, je vais vous parler du livre La Tresse de Laetitia Colombani qui parle de destins croisés, de rencontres humaines. Il m’a beaucoup inspiré en raison de ses portraits entremêlés. Je pense aussi à un autre livre, qui est de loin mon préféré, que je pourrais lire et relire et dont je ne me lasserais jamais, c’est Le Petit Prince de Saint-Exupéry. Je crois que la citation que j’aime le plus est la suivante : « C’est le temps que tu as perdu pour ta rose qui fait ta rose importante ». C’est tellement vrai et je me le répète souvent.

Côté voyages, je suis tombée complètement amoureuse de l’île de la Réunion. Je suis partie 6 mois en sac en dos et j’y suis restée environ quatre années. C’est une île intense, elle se découvre avec l’âme d’un aventurier, ses trésors naturels sont cachés, secrets, il faut sortir ses baskets, aller à la rencontre des gens, c’est un joyau de la nature ! Je vais vous faire une confidence, j’en rêve très souvent la nuit !

Merci à Séverine d’avoir accepté de répondre à mes questions 
Pour découvrir sa démarche, ses engagements et ses créations, c’est juste ICI et
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Composition illustrée signée Minisauts & Luluaucrayon

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